Comprendre l'anorexie mentale, la boulimie et l'hyperphagie boulimie (Binge Eating Disorder)
Par Audrey Chavana LeLes troubles du comportement alimentaire comme l'anorexie mentale, la boulimie et l'hyperphagie boulimique, touchent principalement les pays occidentaux et sont influencés par des facteurs culturels, psychologiques et biologiques. Ces troubles, souvent déclenchés par des régimes et/ou des traumatismes.

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Les troubles du comportement alimentaire appelés aussi troubles des conduites alimentaires (TCA) englobent différentes pathologies dont les principales qui sont caractérisées par une relation perturbée avec la nourriture et le corps. Depuis 2013, avec la publication du DSM-5 (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 5e édition), la classification des TCA a été élargie pour inclure des formes atypiques et partielles, permettant une meilleure reconnaissance et prise en charge de ces troubles.
Cet article explore les trois principaux troubles du comportement alimentaire : l'anorexie mentale, la boulimie et l'hyperphagie boulimique. Ces troubles touchent principalement les pays occidentaux, notamment les États-Unis, le Canada et les pays européens, mais aussi l'Amérique du Sud et la Corée du Sud. Plus le revenu moyen de la population est élevé, plus la faim et la satiété sont ignorées et plus les TCA sont nombreux. Selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), 14 millions de personnes dans le monde sont concernées. En Occident, 3 à 5 % de la population sont touchés.
L'anorexie et la boulimie touchent davantage les femmes que les hommes, bien que les hommes puissent être sous-diagnostiqués. L'hyperphagie boulimique, quant à elle, concerne un peu plus les hommes. Ces troubles débutent généralement après l'âge de 10 ans, souvent à l'adolescence, une période où l'apparence physique devient cruciale pour l'acceptation sociale. Avant cet âge, certains enfants peuvent avoir un rapport difficile avec l'alimentation, mais leur motivation n'est pas liée à leur poids. On parle alors de trouble évitant/restrictif de la prise alimentaire (ARFID), reconnu en 2013, motivé par le dégoût, la peur d'étouffer, un manque d'intérêt ou d'appétit.
Depuis les années 1980, les TCA ont considérablement augmenté. L'hyperphagie boulimique a été reconnue comme un trouble à part entière en 2013 par le DSM-5. Environ 80 % des TCA commencent par un régime, souvent déclenché par des facteurs culturels et psychologiques.
Facteurs culturels :
Nous sommes de plus en plus sédentaires et la nourriture est devenue de plus en plus accessible financièrement, plus riche en énergie et rendue très appétissante grâce aux traitements chimiques industriels. L'alimentation ultra-transformée altèrent la perception de nos signaux de faim et de satiété. La dictature de la minceur, particulièrement prégnante chez les femmes, contribue à ce phénomène. Chez les hommes, l'embonpoint est mieux toléré tandis que chez les femmes, on dira plutôt qu'elles se laissent aller. Cette différence de perception illustre la grossophobie.
Cet article explore les trois principaux troubles du comportement alimentaire : l'anorexie mentale, la boulimie et l'hyperphagie boulimique. Ces troubles touchent principalement les pays occidentaux, notamment les États-Unis, le Canada et les pays européens, mais aussi l'Amérique du Sud et la Corée du Sud. Plus le revenu moyen de la population est élevé, plus la faim et la satiété sont ignorées et plus les TCA sont nombreux. Selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), 14 millions de personnes dans le monde sont concernées. En Occident, 3 à 5 % de la population sont touchés.
L'anorexie et la boulimie touchent davantage les femmes que les hommes, bien que les hommes puissent être sous-diagnostiqués. L'hyperphagie boulimique, quant à elle, concerne un peu plus les hommes. Ces troubles débutent généralement après l'âge de 10 ans, souvent à l'adolescence, une période où l'apparence physique devient cruciale pour l'acceptation sociale. Avant cet âge, certains enfants peuvent avoir un rapport difficile avec l'alimentation, mais leur motivation n'est pas liée à leur poids. On parle alors de trouble évitant/restrictif de la prise alimentaire (ARFID), reconnu en 2013, motivé par le dégoût, la peur d'étouffer, un manque d'intérêt ou d'appétit.
Depuis les années 1980, les TCA ont considérablement augmenté. L'hyperphagie boulimique a été reconnue comme un trouble à part entière en 2013 par le DSM-5. Environ 80 % des TCA commencent par un régime, souvent déclenché par des facteurs culturels et psychologiques.
Facteurs culturels :
Nous sommes de plus en plus sédentaires et la nourriture est devenue de plus en plus accessible financièrement, plus riche en énergie et rendue très appétissante grâce aux traitements chimiques industriels. L'alimentation ultra-transformée altèrent la perception de nos signaux de faim et de satiété. La dictature de la minceur, particulièrement prégnante chez les femmes, contribue à ce phénomène. Chez les hommes, l'embonpoint est mieux toléré tandis que chez les femmes, on dira plutôt qu'elles se laissent aller. Cette différence de perception illustre la grossophobie.
La grossophobie trouve ses racines dans des facteurs historiques, culturels et médicaux. Dans l’Antiquité et jusqu’au Moyen Âge, l’embonpoint était souvent synonyme de richesse et de bonne santé. Cependant, au XVIIe siècle, la minceur a été associée à la discipline et à la vertu, tandis que le surpoids devenait signe d’un manque de contrôle. L’industrialisation a ensuite renforcé cette perception, avec l’émergence d’un idéal de minceur lié à l’efficacité et au rendement. Au XXe siècle, la culture de la mode, des médias et du cinéma a popularisé l’image d’un corps mince comme symbole de beauté et de réussite, reléguant les corps plus grands à des stéréotypes négatifs. Parallèlement, la médicalisation du poids a assimilé l’obésité à une maladie, renforçant la stigmatisation des personnes en surpoids. Aujourd’hui, cette discrimination est intériorisée et normalisée, influençant les perceptions sociales et les comportements, parfois sous couvert de préoccupations pour la santé. Combattre cette stigmatisation demande une prise de conscience collective pour déconstruire ces préjugés et favoriser une approche plus bienveillante du rapport au corps.
Facteurs psychologiques antérieurs aux troubles :
On retrouve principalement du perfectionnisme, une peur de grossir et une faible estime de soi. L'apparition d'un trouble est souvent déclenchée par un événement de vie vécu comme un traumatisme. 30 à 50 % des TCA suivent une agression sexuelle, des violences physiques ou psychologiques. 70 % des personnes souffrant d'un TCA présentent aussi des troubles de l'humeur (dépression, bipolarité). 50 % ont des troubles anxieux. 50 % des personnes présentant de la boulimie ou de l'hyperphagie boulimique abusent de l'alcool ou d'autres substances. Dans l'anorexie, près d'un tiers. La majeure partie ont honte et une mauvaise image de leur corps et d'elles-mêmes.
Le stress, les émotions fortes, la restriction cognitive perturbent nos signaux de faim et de satiété. La restriction cognitive = intention de contrôler son alimentation et/ou son corps dans le but de maigrir ou de stabiliser son poids.
Facteurs biologiques :
Des antécédents familiaux multiplient le risque de développer un TCA. Les déséquilibres hormonaux (hypothyroïdie, syndrome des ovaires polykystiques, endométriose...), la fatigue, certains médicaments (neuroleptiques, corticoïdes, pilules...) altèrent nos signaux de faim et de satiété.
L'anorexie mentale :
L'anorexie mentale, c'est comme être contraint(e) de rester seul(e) sur une bouée, s'éloignant de plus en plus du rivage, avec une vision de plus en plus floue de la terre ferme.
Rester assis(e) sur une bouée symbolise l'effort constant pour maintenir un poids inférieur à son poids d'équilibre. La terre ferme représente le corps et la réalité. La vision floue et le rivage illustrent la restriction cognitive imposée par le contrôle mental sur l'alimentation et le corps, mais aussi la distorsion cognitive de l'image de soi causée par la dénutrition. L'éloignement au milieu de l'océan incarne le vide intérieur résultant de la déconnexion émotionnelle, un mécanisme de survie face au danger métabolique. Enfin, la solitude reflète l'isolement que la pathologie impose à la personne qui en souffre.
On imagine souvent l'anorexie mentale à travers des personnes maigres et hospitalisées. Pourtant, elle peut toucher des individus de toutes corpulences, y compris ceux en quasi-guérison ou alternant des phases de boulimie et/ou d'hyperphagie boulimique, soit une perte de contrôle alimentaire. Le cœur est menacé lorsqu'il y a des alternances restriction et crise de boulimie/hyperphagie boulimique.
Comprendre cette maladie permet d'être plus empathique et moins dans le jugement vis-à-vis de soi-même ou des personnes de notre entourage atteintes de TCA. Les personnes atteintes ne nuisent pas volontairement à leurs relations. Ce n'est pas elles qui mentent, mais la maladie qui prend le contrôle cognitif avec des pensées envahissantes. Il est aussi essentiel de réaliser que les apparences peuvent être trompeuses. On peut être très mince tout en étant à son poids d'équilibre.
Il est très difficile de s'en sortir seul(e) sans conséquences. La prise de conscience arrive souvent tardivement, ou c'est l'entourage qui donne l'alerte. Maîtriser son corps via le sport et son alimentation pour maigrir est perçu comme un culte de bien-être, de santé. Cette perte de poids s'accompagne d'un état de satisfaction de maîtrise de soi, renforçant l'estime de soi. La personne se sent compétente, capable de suivre des règles drastiques, se sent fière. La phase "lune de miel" correspond à la perte de poids, accompagnée d'un état de cétose où les corps cétoniques (substrats énergétiques découlant du tissu adipeux "gras") procurent une euphorie et un effet coupe-faim. Cette phase atteint un seuil lorsque l'on passe en dessous d'un IMC de 18, correspondant au moment où il est très agréable d'être ainsi. Cette phase est appelée zone d'égosyntonique. Rester sous son poids naturel requiert une lutte incessante contre soi-même face à la nourriture qui devient obsessionnelle.
La relation avec l'entourage devient de plus en plus compliquée. Parents, frères, sœurs... ne restez pas seuls, faites-vous accompagner à minima par un professionnel de santé formé à cette pathologie. S'entourer de différents professionnel(le)s de santé est nécessaire car complémentaire. Si les proches ne sont souvent pas pour grand-chose dans le problème, en revanche ils sont toujours pour beaucoup dans la solution. Les remarques sur les repas, le corps, les pensées de la personne concernée sont plus délétères qu'autre chose malheureusement. Il est tout aussi nécessaire que les proches viennent en consultation comprendre la maladie et apprendre à gérer au quotidien afin de soutenir la personne concernée et le reste de la fratrie qui peut se sentir délaissée.
La dénutrition et la restriction cognitive sévère altèrent profondément les fonctions cognitives, la flexibilité psychologique, enfermant la personne dans l'anxiété et la dépression, avec un risque de psychose en cas de psycho-traumatismes sous-jacents. L'anorexie peut gravement nuire, malgré elle, à l'état physique et psychologique de la personne atteinte, avec des séquelles parfois irréversibles. La peur intense de grossir est alimentée par un corps qui réclame de la nourriture, créant une angoisse de perdre le contrôle. Certaines personnes jonglent avec des crises de boulimie/hyperphagie boulimique tellement que la lutte est difficile à tenir.
Lorsque la personne se rend compte de son état, ce qui prend souvent du temps à accepter le diagnostic, elle a peur de lâcher-prise, de grossir sans fin. Déconnectée de son système de régulation, la personne ne sait plus faire confiance à son corps. La re-nutrition est un défi, car l'atrophie musculaire du tube digestif et les carences compliquent la reprise alimentaire. Avec le temps, la maladie façonne la personnalité, devenant une partie de l'identité surtout lorsqu'elle démarre pendant des périodes charnières de développement telle que l'adolescence.
La boulimie / hyperphagie boulimique (Binge Eating Disorder) :
Depuis sa reconnaissance officielle en 2013 (DSM-5), le Binge Eating Disorder (BED) est désormais un TCA à part entière, ce qui facilite la prise en charge et la recherche clinique.
La boulimie / hyperphagie boulimique (Binge Eating Disorder), c'est comme remplir un puits sans fond, invisible aux autres. Peu importe la quantité, il reste toujours vide, tandis que le poids du remplissage devient de plus en plus lourd.
Le puits sans fond symbolise un vide intérieur profond qu'aucune nourriture ne comble réellement. Seul le poids des quantités ingérées procure un soulagement temporaire, un phénomène connu sous le nom de "trouble du réconfort". Invisible aux autres, ce trouble est souvent caché par honte ou tabou, bien qu'il soit fréquent.
Les causes de la boulimie et de l'hyperphagie boulimique sont multiples. Parmi elles, les causes psycho-émotionnelles, où les crises servent à anesthésier des émotions intenses. Dans ce cas, les psychothérapies telles que la thérapie d'acceptation et d'engagement (ACT), les thérapies cognitivo-comportementales (TCC), l'Intégration du Cycle de Vie (ICV), l'EMDR... sont essentielles pour identifier l'origine de la douleur psychique, mettre du sens dans le parcours de vie et développer des stratégies pour améliorer la tolérance émotionnelle. Cependant, en parallèle, il est nécessaire de réapprendre à réguler son comportement alimentaire car face à cette problématique, la plupart tentent de contrôler leur alimentation et/ou leur corps dans l'objectif de maigrir.
Cependant, la cause la plus fréquente reste la restriction cognitive, souvent induite par des régimes ou des règles alimentaires strictes. La restriction cognitive = intention de contrôle mental sur son alimentation et son corps dans le but de maigrir ou de stabiliser son poids. Plus elle est intense, plus elle entraîne une dérégulation du comportement alimentaire et émotionnel. D'abord sous forme de grignotages, elle évolue progressivement vers des pertes de contrôle et des compulsions alimentaires, pouvant mener à un trouble du comportement alimentaire. Cette lutte constante entre la restriction cognitive et le système nerveux central devient de plus en plus forte, aggravant le déséquilibre.
La boulimie et l'hyperphagie boulimique (BED) sont deux troubles du comportement alimentaire marqués par des crises de consommation excessive de nourriture, mais avec une différence clé :
- Boulimie : les crises sont suivies de comportements compensatoires pour éviter la prise de poids (vomissements, laxatifs, sport excessif, jeûne...). La personne oscille souvent entre restriction et crise, maintenant un poids parfois stable ou même insuffisant. Les comportements compensatoires entretiennent le trouble, un effet pervers s'installe. Des carences et un déficit nutritionnel s'installent. Il en ressort souvent une dénutrition et un risque d'hypokaliémie (taux faible de potassium dans le sang) dû aux vomissements engendrant un risque de trouble du rythme cardiaque pouvant être malheureusement fatal. La dénutrition a des effets sur le moral qui lui est un facteur de crise. Les effets de bien-être ne sont que de courte durée entretenant le renforcement du cercle vicieux avec souvent de l'impulsivité.
- Hyperphagie boulimique (BED) : il n'y a aucun comportement compensatoire après les crises, entraînant généralement une prise de poids progressive menant à l'obésité et à une grande détresse psychologique.
Dans les deux cas, ces crises répondent à un mal-être émotionnel, à une dérégulation émotionnelle du comportement alimentaire et à une restriction alimentaire et non à une grande faim physiologique.
Face à ces différents troubles du comportement alimentaire, le comportement alimentaire ayant été très dérégulé, il est possible de se retrouver seulement avec des envies de manger sans avoir la sensation de faim qui est comme brouillée. Retrouver les signaux de faim demandent du temps, réapprendre à réguler son comportement alimentaire y permettra à l'aide d'un(e) professionnel(le) de santé formé(e) à ce type de problématique.
Les TCA sont des maladies complexes, souvent incomprises et stigmatisées. Par honte, les personnes concernées se renferment dans le silence. Pourtant, ce ne sont pas des questions de volonté, mais de véritables troubles nécessitant une prise en charge spécifique. Faites-vous accompagner à minima par un professionnel de santé spécialisé. Vous n'êtes pas seul(e).
La guérison est possible :
Retrouver une relation sereine avec la nourriture et son corps, manger librement sans culpabilité, tout en revenant à son poids d'équilibre. Le chemin est souvent long, mais il mène à une véritable libération. Les thérapies cognitivo-comportementales (TCC), la thérapie d'acceptation et d'engagement (ACT), les thérapies familiales permettent de prendre conscience, de casser les schémas de cercle vicieux, de briser les automatismes défectueux en comprenant les mécanismes physiopathologiques et en regagnant de l'estime de soi autrement que par sa silhouette. Gagner en flexibilité psychologique requiert d'expérimenter vers de nouveaux schémas afin de valider par soi-même et entretenir un cercle vertueux de guérison. Réparer le comportement alimentaire est nécessaire. L'alliance thérapeutique est primordiale avec le(s) professionnel(les) de santé qui entourent la personne et la famille.
Bibliographie :
- Perroud A., Marmion J-F., Eyraud N., Victoire sur les troubles alimentaires, BD psy comprendre et aller mieux, Les Arènes, Paris, 2024.
- Perroud A., Gimenez A., Rigoud D., Faire face aux troubles alimentaires, Retz, 2016.